Histoire

-Tire-toi ! Si tu crois que j'vais payer autant pour me faire allonger le majeur !

-Mais je vous dis que ça vaut carrément le coup ! Et puis 200 000 yens, c'est quoi pour être un surhomme ?!

-Va te faire !

*BLAM*

Et la voilà seule devant le laboratoire, sale et vide. Son matériel sorti pour rien et son cobaye du jour ayant disparu. Elle était dans de beaux draps. Enfin non, ses draps n’étaient clairement pas reluisants vu qu’avec le peu de revenus qu’elle parvenait à faire rentrer, elle avait été obligée d’en rafistoler avec des morceaux de vêtements. Une journée donc complètement inutile. Elle poussa un soupir et commença à nettoyer la pièce, la débarrassant de la poussière sous les lumières chirurgicales de l’endroit. Elle était… fatiguée. Comme tous les jours à vrai dire. Elle ferma la salle, ôtant sa blouse blanche. Elle passa rapidement devant le bureau de sa mentor, qui n’était pas là, probablement en donjon à ce moment précis et se décida à rentrer.
Sur le chemin, elle acheta une énorme bouteille de bière dans une supérette, bouteille que de toute façon, elle ne boirait jamais comme toutes les autres. Lorsqu’elle atteignit finalement son petit appartement, sa lumière inexistante lui donna presque envie de dormir dehors. Elle alluma tout de même les lampes, se sortit un bentô tout préparé et s’écroula sur son canapé. Comment en était-elle arrivée là ?

Maya de son nom de naissance était ce que l’on pourrait qualifier de “bordel génétique”. Née d’un père et d’une mère Brésiliens n’ayant pas souhaité la garder, elle était passée de famille en famille dans son pays d’origine pendant plusieurs années. Des gentilles, des désagréables, pendant de plus ou moins longs laps de temps. C’est aux alentours de ses six ans qu’elle fût finalement adoptée par une mère célibataire. Une femme de caractère nommée Pietra qui lui avait enseigné l’art de vivre dans un quartier moins aisé… par le biais de la bien belle arnaque ! Eh oui ! Les débuts de vie qu’avait expérimenté la petite basanée avaient principalement consisté à jouer de son visage enfantin et pitoyable pour extorquer de l’argent aux plus riches du Brésil. Cela dura… un petit moment, jusqu’à ses onze ans. Année durant laquelle sa mère rencontra un bien bel homme. Venu du Soleil Levant, il l’avait complètement charmée et lui avait promis monts et merveilles ! Il fallait croire que les arnaqueurs en attiraient d’autres. Maya et Pietra l’avaient suivi jusqu’au Japon et s’y étaient installées pour se retrouver dans une maison médiocre dans un quartier médiocre de la banlieue Tokyoïte. Ca n’empêcha pas spécialement la famille de fonctionner même s’il s’agissait là plus d’une aide mutuelle entre les deux partis et voilà que les deux Brésiliennes se retrouvèrent affublées du nom Itami.

Pietra devint une honnête travailleuse à Hokkaïdo et Maya fût envoyée dans le lycée du coin. En très peu de temps, l’adolescente apprit à parler Japonais et surtout, elle travailla d’arrache-pieds pour devenir l’une des meilleures élèves de l’établissement. Un véritable monstre en Histoire, matière littéraires et surtout scientifiques, lui traçant un avenir des plus reluisants ! Pourquoi une telle assiduité ? Eh bien pour ne jamais plus avoir à mendier. Elle l’avait promis à sa mère.
Elle poursuivit ses études en dépit de relations sociales, des moqueries à cause de son statut d’étrangère et même de sa santé pour atteindre une bonne université. Université dans laquelle elle avait déjà pu souffler et retrouver un semblant de connexion avec l’espèce humaine. Elle n’avait plus le besoin d‘être LA meilleure et elle put simplement travailler. A mi-parcours, elle avait réussi à se faire embaucher dans un laboratoire de bio-mécanique. Elle y passa d’agréables années à faire partie de l’équipe de recherches principalement concentrée sur le cerveau. Mais en tant qu’étudiante, aussi bonne soit-elle, elle n’avait que des jobs secondaires. C’est dans ce contexte qu’elle obtint son doctorat. Elle resta dans ce laboratoire bien côté et put littéralement rentrer dans le lard. En bonne scientifique, elle avait plutôt bonne réputation et c’était elle qu’on venait voir pour les projets laborieux ou farfelus qui concernaient la matière grise des patients.

C’est cette année précise qu’elle reçut un étrange mail. Un mail anonyme lui demandant une exclusivité sur son dernier projet : Une puce à installer dans le cerveau pour réduire le temps de réaction. L’invention avait bien avancé mais n’était qu’au stade de prototype et n’avait pas été rendu publique. Dans le doute, Maya avait préféré ignorer. Une fois, deux fois, trois fois. Et finalement c’était une marée de spams, de mails et de coups de fil. Mais la scientifique avait préféré ignorer. Une ignorance qui dura quelques semaines alors que les recherches avançaient. C’est à ce moment que des événements plus inquiétants commencèrent à arriver. Cela commença par la réception d’une photo de son appartement alors que Maya était à l’intérieur, ce accompagné de la date et de l’heure. Partant de là, les risques s’accentuèrent, allant de réelles informations personnelles à des menaces de mort si la Brésilienne appelait la police.
Pourtant, elle n’avait pas cédé. Elle conservait ses recherches secrètes et s’était refusée à dévoiler ou accepter quoique ce soit. Ce, jusqu’à une nuit fatidique. Maya s’était réveillée en sursaut et en sueur. Elle avait de violents hauts-le-cœur et dut aller se mouiller le visage. En revenant, un homme cagoulé était à son balcon et il agitait une main en direction de Maya. La main de quelqu’un d’autre.

-J’ABANDONNE ! Je vais le faire c’est bon ! Laissez-moi tranquille !

Elle avait craqué. Et ça avait marché. L’homme était parti. Et Maya était dans un état des plus précaires. Ce harcèlement la minait déjà bien assez depuis le début mais là, c’était trop proche, trop concret : sa vie était en danger.
Les faucheurs avaient bien préparé leur coup, ils avaient mis cette menace à exécution le jour précédant la première opération concrète. Ainsi, le lendemain, un tueur avait remplacé le sujet de test prévu à la base. Et le reste de la bande tenait les scientifiques en otage. Maya n’avait plus le choix, si elle ne le faisait pas, non seulement elle mourrait mais le reste de son équipe avec. Elle ne pouvait plus reculer et cette invention qui lui avait pris tant de temps et d’énergie finirait dans le crâne d’un criminel.

L’opération fût un succès.
Les faucheurs disparurent plusieurs semaines.
Et une explosion.

Le faucheur à qui la puce avait été intégrée avait décimé une équipe dans un donjon. Il avait été capturé, interrogé et avait vendu l’entièreté du labo. Tout se passa très vite : des interviews très invasives, des procès longs comme le bras, un tout qui fit complètement couler l’entreprise, ainsi que tous ses employés. La plupart était totalement blacklistée au Japon, certains avaient quitté le pays ou changé d’identité mais c’étaient les plus chanceux. Ceux qui n’avaient pas réussi à atteindre l’anonymat se retrouvaient au chômage et régulièrement menacés.
Ce fût le cas de Maya. Vivant désormais dans un appartement miteux, elle devait barricader ses fenêtres, éviter au maximum internet et attendre probablement la mort dans sa solitude. Car oui, elle n’était pas passée à l’acte mais la dépression avait bien vite toqué à sa porte et sur sa table se trouvaient constamment une corde, de l’alcool et de la drogue qu’elle n’avait pas le courage d’utiliser.
Le pire dans tout ça ? Le faucheur avait réussi à s’évader.

C’est l’un de ces jours dans l’obscurité qu’elle eut son éveil à la lumière. Et si elle n’avait aucunement l’intention de devenir chasseuse, cela eut le mérite de lui donner envie de se reprendre en main.
Vint une longue période durant laquelle Maya vogua de psychologue en psychologue jusqu’à tomber par hasard sur une qui trouva le moyen de la remettre sur pieds. Les séances d’aide psychologiques s’enchaînaient et la scientifique se reprenait finalement en main.

Mais retrouver du travail n’allait pas être tâche facile. Ainsi, elle décida… d’aller dans un donjon de Rang A ! Une bien piètre idée, elle ne s’était absolument pas renseignée et avait manqué d’y laisser la peau. Cela dit, cette expérience lui permit de rencontrer Homura Hayate. Chasseuse de Rang A dans la Guilde des Chasseurs. Une femme de caractère qui semblait avoir pris la scientifique en affection. Coup de chance ou le destin ? Peu importait, Maya avait donc décroché un poste de chercheuse en Recherche & Développement dans la Guilde. Un poste assez aléatoire dans les revenus mais au moins, elle avait un travail qu’elle était sûre de garder tant que ses rapports avec Homura n’étaient pas tumultueux. Mais ce n’était pas comme si elle n’avait aucun démons avec lesquels traiter.