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Vsevolod Yegorovich
Vsevolod Yegorovich
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Date d'inscription : 06/12/2020

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Sam 12 Déc - 15:08
Le froid n’avait jamais dérangé Vsevolod, qui regrettait simplement l’absence tragique d’une bouteille de son alcool entre ses lèvres. Ce dernier ayant été qualifié « d’impropre à la consommation, représentant de toute évidence un danger gravissime pour toute personne le consommant, capable de dissoudre les dents et le métal et contenant des matières organiques dont la présence défie autant le bon gout que le bon sens » par les autorités médico-bureaucratiques centralisées de l’endroit, il n’était en théorie pas autorisé à continuer d’en produire. Cela l’avait grandement chagriné, d’autant plus qu’il n’avait présenté à la commission effarée que la version la plus douce de son produit. Retenant difficilement un long soupir, il regarda autour de lui. Les braves gens qui l’entouraient semblaient tous d’attaque pour affronter le donjon, et malgré les températures pour le moins frisquettes et l’heure bien matinal, il pouvait voir sur leurs nobles faces la flamme inextinguible de la détermination et l’envie de s’assurer que leurs concitoyens seraient à jamais protégés de la menace des hordes d’outre-monde qui grouillaient dans les recoins obscurs des failles dimensionnelles.

Ça, ou l’appât du gain, mais on ne composait généralement pas de chansons épiques sur des sagouins motivés par le seul besoin de limer un peu leurs dents trop longues. Surtout quand leur gain était celui d’un donjon de bas rang, finalement bien misérable quand on regardait les risques encourus. Il fallait simplement espérer ne pas être obligé d’assister à la tragique répétition d’un des accidents auxquels le pauvre Vova avait été mêlé. Il était après tout terriblement malchanceux.

« Ok les rats, voilà comment ça va se passer ! beugla leur meneur du jour, ses manières militaires transparaissant de manière évidente. En formation en carré, avec le soigneur au centre ! On a pas eu le temps de trouver de mage intéressé, c’pas Tokyo ici, donc on fait avec les moyens du bord. Des questions ? Bah j’en ai rien à foutre ! En avant, Marche ! »

Si le joueur russe s’était rapidement rendu compte qu’il ne partageait pas réellement d’atomes crochus avec le militaire, c’était seulement maintenant qu’il s’était adonné au loisir universellement adoré des chefaillons de son espèce qu’il se rendait compte que son expérience du jour risquait d’être éminemment pénible. Il s’était contenté de répondre à l’annonce en renseignant son rôle, et comme d’habitude, on lui avait expliqué qu’il servirait d’homme à tout faire. Si les gens comme lui, dotés de statistiques particulièrement faibles, avaient normalement bien du mal à trouver des groupes capables de l’accueillir, Vsevolod disposait au moins d’un atout majeur le démarquant des autres raclures de fond de panier : il était un homme des bois, un vrai, en phase avec la nature et les bêtes. La société moderne avait longtemps considéré ces capacités comme l'obsolète reliquat d’un autre âge, mais l’apparition des donjons avait dans les faits redonné à ce dernier tout le prestige qu'il n'aurait jamais du perdre. Il était loin d’être une superstar, ceci dit. Mais au moins, il était employable. Et bientôt, son nouvel ami le système l’aiderait à devenir un homme nouveau, à se débarrasser des entraves de la médiocrité qui l’obligeaient à se coltiner ce genre de personne détestable.

Le chef brailla un autre ordre, et Vova l’imagina un instant réduit à l’état de pâtée pour chien. Grinçant des dents, il pénétra dans le donjon à la suite du groupe, peinant toujours autant à s’habituer à la désagréable sensation de son corps qui se retrouvait soudainement dématérialisé puis rematérialisé dans un environnement à l’existence métaphysiquement discutable. Sa mère aurait sans doute considéré l’expérience avec beaucoup de méfiance, s’interrogeant pour peu que son esprit limité (il demanda intérieurement pardon à sa génitrice pour ce manque de respect) parvienne à le faire sur la question hautement théologique de l’âme. Car s’il était évident que le corps et l’esprit étaient transportés entièrement et sans préjudice, ces portails reniflaient de toute évidence l’hérésie, et la question de l’âme méritait d’être soulevée : en passant ces failles dimensionnelles, en quittant la Terre, monde illuminée par la lumière du Seigneur et le sacrifice de Jésus Christ, renonçaient-ils de fait aux bienfaits de leur présence ? Les autorités religieuses débattaient encore à ce sujet.

Lui ne s’en souciait à vrai dire que très peu, son âme étant de toute façon peu recommandable, et y réfléchir avait surtout été un moyen de passer le temps pendant son transport. Sitôt que ce fut fait, il regarda autour de lui, bannissant loin de son esprit ces pensées subalternes. Il fallait étudier son environnement, maintenant, et comprendre ce qu’ils allaient devoir faire. Ils se trouvaient dans une sorte de caverne, aux murs blancs qui semblaient imiter la couleur du marbre, sans en avoir la texture veinée. Légèrement luminescente, elles plongeaient l’endroit dans une pénombre qui rendait difficile un examen plus précis des lieux. Le groupe s’équipa de sources de lumières, leurs multiples faisceaux perçant les ténèbres comme autant de lances affamées, complétés rapidement par la lueur plus diffuse de lampes-tempête. Ainsi harnaché, la petite compagnie eut le loisir de détailler plus soigneusement l’endroit. Vsevolod eu le déplaisir de le découvrir parfaitement repoussant.
Vsevolod Yegorovich
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Sam 26 Déc - 17:18
Il se savait certes avoir un œil perçant et une imagination active, ce qui le poussait souvent à trouver des symboles là où il n’y en avait pas forcément. Parfois, cela lui permettait de décoder l’alphabet secret du monde, de comprendre ce qui était inscrit en caractères secrets, révélés seulement aux véritables adeptes. D’autres fois, il s’enfonçait simplement dans le caractère circulaire de ses propres pensées, et se perdait. Parfois longtemps, parfois avec des conséquences tragiques. Mais ici, le message était clair. La lueur hésitante des murs blanchâtres, balayée par l’illumination apportée par les humains, peinait à révéler vraiment l’horreur de l’endroit. Le sol était partout couvert d’un enchevêtrement ahurissant de rails, sur lesquels s’agitaient inlassablement de nombreux wagons chargés de matériaux curieux. Ces derniers passaient tout proche d’eux à une vitesse incroyable, le souffle et le bruit vrombissant de leur course comme seul témoins de leurs passages. La pièce s’ouvrait ainsi comme une ruche sur plusieurs tunnels, certains trouant le plafond ou le sol, d’autres les murs. Et tout cet enchevêtrement était complété par un autre réseau, de tuyau épais de cuivres et d’acier et de verre, qui pulsaient et révélaient lorsqu’ils étaient transparents les contenus de leurs boyaux. C’étaient là des liquides divers, aux couleurs et aux aspects ésotériques. Parfois, comme de vieux monolithes parcourus de courants antédiluviens, ils pouvaient voir se dresser çà et là de vieilles machines aux fonctions arcanes et aux formes complexes, des écrans électroniques dévoilant divers messages composés dans un langage qu’ils ne connaissaient pas, et qui ne ressemblait à rien de connu.

Et toute cette machinerie parasite, qui semblait comme une tumeur dans les entrailles mutilées de la roche, semblait pulser en un rythme cohérent, comme si le bruit assourdissant et les odeurs acres et le chaos ambiant répondaient tous aux mêmes règles, au même esprit pervers d’invention qui semblait réguler cette infestation. L’endroit était malade, conclut Vsevolod. Malade, et moribond. Il s’arma de sa hache. Il n’avait pas jugé bon de rendre public son récent gain de puissance. Si ce dernier lui aurait sans doute facilement permis un accès à des donjons plus lucratifs, Vsevolod n’était pas une personne motivée par l’appât du gain. Ses besoins matériels étaient bien minces, et il aurait à vrai dire très facilement pu se couper de la société, vivant en ermite autosuffisant sur son lopin de terre. Il regarda le tranchant de son arme. Il n’avait jamais besoin de l’affuter, et ce détail témoignait facilement du caractère surnaturel qu’avait sa hache malgré son humble facture. Il écouta leur meneur donner ses ordres, poussant encore de la voix pour couvrir le vacarme ambiant. A ce rythme, il ne tiendrait pas bien longtemps avant que ses cordes vocales ne le lâchent. Ce n’était après tout pas là son affaire, et il obéit aux consignes, prenant sa place dans la formation. Il était là pour servir d’homme à tout faire et surveiller leurs arrières, comme toujours. Ce rôle lui convenait parfaitement, ceci dit : il aimait n’avoir personne dans son dos. Ils se mirent ainsi en route, leur progression se faisant lente et précautionneuse. Il était dans cet environnement très difficile d’entendre arriver de potentiels ennemis, et le ballet incessant des wagons les obligeait à la plus grande prudence. Mourir d’un pseudo accident industriel aurait après tout été particulièrement honteux pour des gens prêts à tout pour échapper à ce genre d’existence.

Ils finirent tout de même par sortir de ce réseau, et gagner le plus grand des tunnels. Ce dernier, séparé en deux parties égales par le rail qui le traversait, laissait retentir l’écho annonciateur de l’arrivée de l’un de ses chargements. C’était un bruit lourd, que l’on entendait arriver en vagues déformées et graves, avant de voir le wagon les dépasser à toute vitesse. Ils avancèrent ainsi pendant cinq minutes, seul le bruit régulier des wagons et la musique de la machinerie venant troubler le silence du groupe. L’endroit surchargeait leurs sens, et rendait toute conversation superflue. Quarante-trois secondes d’intervalle entre chaque wagon, compta Vsevolod. Un rythme toujours respecté, jusqu’à ce qu’il ne le soit plus, et qu’un des wagons arrive tardivement.

Le joueur fronça les sourcils, soucieux de ce retard. Dans un endroit qui avait été expressément créé pour leur être hostile, ce genre de manquement n’était pas anodin. Il resta sur ses gardes, alors que le véhicule poursuivait vers eux sa route, arrivant malgré tout à la même allure que ses prédécesseurs. Quand il passa proche de leur groupe, il eut à peine le temps de réagir quand un groupe de petits être verts bondit sur eux, surgissant de leur véhicule en brandissant un équipement exotique. Leurs corps, musclés et élancés, se terminaient souvent à la place des mains par des implants mécaniques aux apparences aussi curieuses que les machines omniprésentes. C’était là des foreuses, des pistons qui actionnaient des têtes de pioches, des disqueuses aux roues dentées et d’autres outils qui auraient sans doute été ridicule dans une autre situation. L’effet comique de leur apparition fut cependant quelque peu ramolli par leurs velléités agressives, et le fait qu’un des membres du groupe ne réagit pas suffisamment vite. Sa tête explosa comme un fruit trop mur sous le coup de la prothèse industrielle du gobelin, et les quatre intrus profitèrent de l’horreur et de la confusion semées dans le groupe pour continuer leur assaut.
Vsevolod Yegorovich
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Dim 27 Déc - 14:59
Il se demandait parfois ce qui n’allait pas chez lui. S’il était évident que sa psyché, malgré son incroyable résilience, n’était pas structurée de la manière la plus conventionnelle, les règles précises qui régissaient son agencement lui échappaient, et ce malgré des recherches importantes autant que régulière. Il avait tout d’abord exploré les pistes les plus évidentes, et écarté la sociopathie pour retenir la psychopathie, malgré son manque évident de tendances à l’impulsivité. En tout cas la plupart du temps. Esquivant l’attaque du gobelin qui l’avait pris pour cible, il détailla son faciès hideux. Un nez oblong, qui lui faisait penser à un organe sexuel dressé, et de petits crocs alignés sur deux rangées. Des yeux jaunâtres en fentes horizontales, qui luisaient d’un sadisme crasseux et bas, le tout vissé dans un crâne bossu et irrégulier, surmonté çà et là de touffes miteuses de poils. Il l’attrapa par le col, le coupant en plein vol, avant de l’envoyer s’écraser contre le sol et de pulvériser sa tête du talon, observant un court instant le manège de sa prothèse mécanique, qui continua de tourner malgré la mort de son propriétaire. Grognant, il se replongea dans ses pensées. Le caractère psychopathique lui correspondait somme toute bien, mais n’expliquait pas tout chez lui. Il avait aussi pensé à une forme rare d’autisme, manifestée dans l’importance qu’il accordait à la planification de son existence et l’exécution régulière de certains rituels. Mais il n’en était à vrai dire pas sûr, et de nombreuses autres théories se bousculaient dans sa tête. Il lui aurait à vrai dire été nécessaire de mettre la main sur un psychiatre pour trouver la bonne réponse, mais il se voyait mal expliquer de manière honnête ses agissements à quelqu’un et conserver ensuite sa liberté. Peut-être qu’en capturer un pourrait leur permettre de travailler là-dessus ? L’idée était intéressante, et à explorer.

Pendant qu’il travaillait sur son introspection et son équilibre intérieur, le reste de son groupe réagissait à l’attaque des petits lutins facétieux. Si leur assaut initial les avait pris par surprise, les créatures ne représentaient au final pas une menace sérieuse, et leur irruption au milieu de leur formation n’avait produit après la perte initiale d’un chasseur que quelques blessures somme toutes légères. Vsevolod se pencha sur le cadavre qu’il venait de mutiler, tout en essuyant son pied sur la roche. L’attrapant par la cheville, il se redressa et le secoua un peu, achevant de faire couler le sang qui s’échappait en flots fatigués de sa blessure. Il le trouva léger, et observa plus attentivement le mécanisme qui remplaçait son bras dominant, se demandant si les créatures s’amputaient volontairement ou si cet assemblage chaotique était le résultat de conditions de travails ne répondant pas aux normes les plus basiques. La première option lui sembla plus probable, si tant est que ces créatures se reproduisent réellement, et ne soient tout simplement pas les produits magiques du donjon, matérialisés selon ses besoins. Il n’avait après tout jamais eu le loisir d’observer attentivement le fonctionnement d’une société monstrueuse, les contraintes du donjon l’empêchant de batifoler comme il l’aurait souhaité. Passant sa hache à sa ceinture, il se saisit de son fidèle couteau de chasse, et commença son travail de charcutage, tranchant dans le cadavre pour en extraire le cristal. Ce fut chose rapide, la petite taille du corps et son expérience lui permettant de s’acquitter de sa tache rapidement, et il remarqua avec surprise que certains organes de la bestiole avaient eux aussi été remplacés par leurs pendants mécaniques. Au vu de la grossièreté de l’ouvrage, sa survie défiait l’entendement. Il n’eut cependant pas le temps de se pencher plus avant sur l’étude de la bestiole, le caporal improvisé recommençant à donner de la voix. Il fut donc bien obligé de laisser tomber le corps au sol, et de se remettre à marcher. Essuyant ses mains ensanglantées sur son pantalon, il rangea sa lame dans son étui et se rééquipa de sa hache. Les effets de cette arme étaient plus merveilleux encore que ce qu’il pensait, et même si le système lui permettait de les anticiper, en faire directement l’expérience était euphorisant. Le simple fait de tenir cet arme l’emplissait de force et augmentait son endurance.

Un sourire carnassier déforma sa face. Il se demandait ce sur quoi il réussirait à mettre la main dans le futur, quand il aurait eu plus le temps d’exploiter le système. Pour l’heure, il s’agissait encore de peiner durement à la tâche, et de s’assurer que son bras soit dur et fort, et charcute avec entrain.
Vsevolod Yegorovich
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Dim 27 Déc - 18:27
Ils avancèrent ainsi encore quelques temps, et Vsevolod fut déçu de ne plus pouvoir compter les secondes entre chaque passage des chariots, ces derniers refusant maintenant de revenir. Visiblement, les maîtres des lieux étaient tout à fait au courant de leur présence, et estimaient qu’ils posaient un danger pour la bonne marche de leurs opérations. Sans doute fut-ce également pour cela qu’ils croisèrent sur leur route de nombreux équipements miniers abandonnés à la hâte, jusqu’à ce qu’enfin ils sortent de leur tunnel. Devant eux s’étalait une autre salle, assez semblable à celle dans laquelle ils s’étaient matérialisés au début de leur excursion, à ceci près qu’elle s’ouvrait à quelques mètres devant eux sur un gouffre profond, duquel montaient en grappes des lumières orangées. Après avoir scanné la pièce, ils s’approchèrent de l’abysse, tentant de comprendre ce qui s’étalait au fond de ce dernier. Le donjon ne semblait pas disposé à rendre facile leur exploration, et si personne ne voulait le formuler à voix haute, les moins idiots d’entre eux savaient que rien ne garantissait qu’ils soient sur le bon chemin. Même l’archer du groupe, doté d’une vision surhumaine, ne parvint pas à discerner grand-chose, si ce n’était que le chemin qui menait au gouffre se faisait de plus en plus rude et semblait de moins en moins contaminé par les créations des gobelins. Si le joueur russe aurait aimé pouvoir continuer à examiner ces créatures, qui se faisaient maintenant bien discrètes, il n’en dit rien, attendant de voir la direction que comptait prendre le groupe.

L’assemblée s’éloigna un peu du gouffre, et se réunit, laissant pour le coup Vova et deux autres personnes monter la garde pendant que les meneurs et les gens les plus respectables du groupe se réunissaient pour décider de la marche à suivre. Les palabres durèrent bien cinq bonnes minutes, avec des interjections d’une rare productivité portant sur des sujets aussi variés et pertinents que la nécessité de toujours tourner vers la droite, de séparer (ou de ne pas le faire, c’était selon) le groupe pour couvrir plus de terrain, et autres idées lumineuses. Sans doute auraient-ils pu y passer plus de temps encore, si le sol ne s’était soudainement pas mis à trembler, annonçant avec une élégante discrétion l’arrivée imminente d’un nouveau danger. Les quelques gravillons et pierres disséminés sur le sol de la grotte se mirent à sautiller sur places, pris de soudains tremblements, et le plafond même se mit à laisser tomber une fine pellicule de poussière, des siècles d’usure révélés en un instant. Finissant par comprendre ce qui arriver, Vsevolod hurla au groupe de s’écarter du centre de la pièce et de se tenir prêt. Si ce genre d’intervention de sa part aurait en temps normal été accueilli avec méfiance et dédain, l’urgence de la situation sembla ici supplanter l’ordre hiérarchique normal, et tous obtempérèrent. Quelques instants plus tard, le sol explosait en une cascade de débris rocheux et de poussière, l’écran de poussière se dissipant au bout de quelques secondes, révélant un autre groupe de gobelins, cette fois-ci visiblement mieux préparé. Pilotant un engin hybride, mélange hasardeux entre un tank et une foreuse, ils se répandirent hors de ce dernier en une marée grouillante et hurlante, se jetant sur le groupe médusé, profitant de leur manque d’organisation.

Au moins Vsevolod était-il mieux équipé que les combattants à distance pour se débrouiller seul, et son premier revers de hache vint se fracasser contre la mâchoire du premier assaillant, emportant indifféremment os, dents et chair. Il eut à peine le temps d’entamer son deuxième mouvement que les trois créatures suivantes, trop pressées de l’atteindre pour prêter attention au funeste destin de leur congénère se jetèrent sur lui. Il intercepta aisément la première, et balança son poing dans la gueule de la deuxième, mais la troisième réussit à trouver le chemin de sa cuisse, sa pioche mécanisée emmenant dans un grand mouvement un large pan de chair. Serrant les dents, Vsevolod jeta sur elle son dévolu et un regard incendiaire. Tenant difficilement debout, il tomba sur elle de tout son poids, profitant de son élan pour fracasser sa cage thoracique d’un coup de coude. Activant en même temps le pouvoir de sa rune, il sentit l’impact absorber une partie de l’énergie vitale de son adversaire, et ainsi soigner quelque peu sa blessure. Elle nécessiterait toujours une intervention plus pousser, mais au moins sa jambe n’était plus en danger définitif. Galvanisé par ce débordement de violence et les sensations conjointes de douleur et de récupération accélérée, il frappa de nouveau, joignant au-dessus de sa tête ses deux mains autour du manche de sa hache, avant de l’abattre sur le gobelin, incapable de repousser son assaillant, trop lourd et fort pour son corps malingre. Il s’y reprit plusieurs fois, s’assurant qu’il ne reste rien de la peste, avant de se relever et de regarder autour de lui, cherchant à prendre la mesure du combat qui continuait.
Vsevolod Yegorovich
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Mer 30 Déc - 21:44
Il accomplissait là quelque chose d’incroyable. L’humanité, depuis qu’elle était en mesure de penser et de comprendre et de considérer ses propres membres, avait été fasciné par la forme multiple de ses incarnations, et les métamorphoses constante qu’elle subissait autant qu’initiait. L’idée de se soigner ou de prolonger son existence par des moyens arcanes était un mythe commun à toutes les cultures que le joueur russe connaissait. Des nécromanciens aux vampires en passant par les sacrifices rituels, le folklore regorgeait d’images horrifiques décrivant les horribles apothéoses de gens qui n’était plus tellement humains. Et maintenant qu’il sentait l’énergie vitale du gobelin courir en lui, qu’il pouvait se dresser sur une jambe qui il y avait de cela à peine quelques instants étaient encore brisée, il comprenait enfin vraiment pourquoi. C’était là l’anéantissement total de son adversaire, plus fort encore que les rites cannibales les plus ancestraux, plus fort encore que la suppression de son nom de l’histoire. Il dévorait son essence, son fluide, son âme, il ne savait quelle force mystique, et la faisait sienne. Enivré par la sensation nouvelle, il s’approcha de l’ennemi suivant, ses sens en éveil. Il le voyait, si faible, si lent, et il voyait les pores de sa peau et le dispersement irrégulier de ses poils grisâtres sur celle-ci et son rictus mauvais et la lueur malsaine de ses yeux. Il frappa. Ses doigts étaient serrés autour du manche de sa hache, et le mouvement, simple, maintes fois répétés, ne s’embarrassa d’aucune fioriture. Un instant, il tendait les muscles de son bras, sentait ses fibres se préparer à la détente. Celui d’après, il lâchait le tout, dans une décharge autant cinétique que mentale, et regardait son mouvement mordre dans le corps de la créature. Les chairs giclaient comme autant de rubans rougeoyants. Le sang pulsait comme si on avait cassé une vieille canalisation. Le cri ne sortait pas de la gorge, et dans les yeux, il n’y avait plus de lumière.

Il se sentit puissant, et grand, et très accompli.

Le combat cependant ne devait pas lui permettre de continuer à explorer ces pistes nouvelles. La force gobeline fut rapidement mise en déroute, et les membres les plus vifs et réactifs du corps d’assaut eurent tôt fait de se replier dans le tunnel que leur improbable machine avait ouvert. Deux morts, dans le groupe des aventuriers, et des jurons et quelques sanglots discrets et des visages pâles. La mort était pourtant commune dans les donjons, et malgré cela, il était toujours étonné de constater que personne ne semblait s’y habituer. C’était une chose curieuse, que de voir des gens si pleins de leur force être mis d’un coup face à leurs mortalités respectives. Il y eut quelques instants de silence, alors que les corps étaient déplacés sur les côtés de la pièce, pour pouvoir être récupérés lorsque le donjon se fermerait, puis sans doute renvoyés aux familles. Vsevolod se retint de suggérer de ramasser leurs équipements. Il avait déjà essayé de faire cela, une fois, lorsqu’il était encore jeune et inexpérimenté. Les réactions n’avaient pas été particulièrement enthousiastes. Il fallut de longues minutes pour que tout le monde reprenne ses esprits, et se remette en ordre de marche. Lui-même aurait bien employé ces dernières à dépecer les cadavres des monstres, histoire de ne pas être trop ralenti, mais une fois de plus, il comprit qu’il était attendu de lui qu’il fasse preuve de tristesse et de désolation. Ce n’était pas chose difficile, tant qu’on ne lui demandait pas de faire couler des larmes. Mais joindre les mains sur son ventre et baisser la tête, il pouvait.

Il fut au final décidé de descendre la falaise. Si le joueur doutait de la pertinence tactique de cette décision, l’idée de se retrouver sur un sentier suspendu au-dessus du vide quand leurs ennemis avaient déjà fait la démonstration de leur capacité à affecter le terrain ne l’enchantant guère, il fit encore une fois preuve d’une louable discrétion. Ils se mirent donc une fois de plus en marche, se suivant deux par deux pour s’accommoder de l’étroitesse de la descente, progressant avec lenteur et prudence. Finalement, celle-ci se passa bien, et s’il leur fallut un plus d’une bonne heure pour terminer la manœuvre (un des nombreux dons originaux bien que d’une utilité discutable de Vova était la précision de son horloge interne, plus proche chez lui de la fusion d’un chronomètre et d’une horloge atomique), cela leur laissa tout de même le temps de prendre la mesure du paysage. Les foyers lumineux et éparpillés qu’ils avaient vaguement discerné depuis leur promontoire se précisèrent progressivement, révélant non pas comme ils s’y seraient attendus des groupements d’habitations, mais des constructions larges et trapues, éclairées par des lampes mécaniques qui jetaient des lueurs sales. Le joueur les étudia longuement, profitant de cette accalmie, tentant d’en comprendre la fonction. Mais c’était là quelque chose de compliqué, et les constructions, aussi entourées de mécanismes qu’elles soient, étaient elles totalement épargnées par les ajouts mécaniques qui gangrenaient le reste de l’environnement.
Vsevolod Yegorovich
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Mar 5 Jan - 17:54
En se rapprochant des modestes structures, il put voir que toutes n’étaient pas totalement dénudées. Sur leurs arrêtes épurées gisaient parfois les corps de quelques gobelins, leurs chairs semblant prendre l’aspect des autels. Les diverses augmentations mécaniques qui décoraient normalement leurs chairs avait été enlevées, souvent de manière brutale. Les bras mécaniques devenaient moignons, les implants qui dépassaient du crâne s’ouvraient sur des plaies plus ou moins mal refermées, et seuls leurs abdomens, parfois, semblaient accueillir une nouvelle matière, se couvrant d’inscriptions indéchiffrables et de symboles que Vsevolod imagina mystiques ou religieux. Ils gonflaient et enflaient, soulevés de l’intérieur par une présence inconnue, et le groupe observa avec une méfiance horrifiée le spectacle déroutant. Il était après tout assez facile de comprendre ce qui se passait ici, et les corps mutilés des gobelins, discernables seulement de cadavres par leurs gémissements intermittents, étaient autant de sacrifices. Vsevolod ne savait pas à quoi, ni pourquoi, mais comme tout le monde, il savait que ses interrogations trouveraient bientôt leurs réponses, sans doute de la manière la plus violente et explicite qui soit. Il se retint difficilement de tripoter les ventres gonflés, et resta à la place dans les rangs, contrôlant avec la même difficulté les muscles de son visage. Le sourire maniaque qu’il aurait souhaité laisser s’afficher sur son visage reste caché, et les tremblements impatients de ses doigts.

Ils progressèrent, avançant entre les îlots des autels. Le sol était lisse, remarqua-t-il. Le reste de la caverne et de ses boyaux avait toujours été pleins d’aspérités et d’irrégularité, mais pas celui de cet endroit. Il était lisse, comme le marbre d’un temple, comme la peau d’une belle femme. Il avait été travaillé, longuement, précautionneusement, et il semblait au joueur russe difficile d’imaginer que les créatures brouillones soient capables de la discipline nécessaire à la réalisation d’une telle prouesse. Il y avait autre chose ici, sans doute la ou les créatures à qui ces sacrifices étaient adressés. Sa langue lécha la face intérieure de ses dents, et ils continuèrent d’avancer. Ils dépassèrent rapidement le champ des sacrifices, laissant derrière eux les lumières orangées et les peaux vertes. Seul le sol lisse, et maintenant humide resta comme avant, et le bruit régulier de leurs pas fut presque suffisant pour couvrir celui des mandibules cliquetantes et des pattes cristallines. Presque, et quand la première araignée vint s’écrasa au milieu de leur groupe, sa masse pachydermique et son exosquelette minéral lacérant le sol et le corps d’un des soigneurs, explosant le tout en une masse de poussière blanche et de débris organiques. Vova se jeta en arrière, sa hache fermement tenue, et il regarda la créature, avant d’observer son environnement. Une araignée. De tous les clichés possibles, c’était l’araignée qui avait été choisie comme déité du culte des troglodytes. Il ne s’accorda pas plus de temps pour l’étudier, et partit à l’assaut. Il n’était pas normal pour lui de s’exposer ainsi, mais il ne pouvait pas se permettre de perdre plus de membres de son groupe. Il risquait d’avoir besoin d’eux. Grimpant sur l’arrière du corps de la créature, il chercha dans sa carapace cristalline d’éventuels points faibles, optant finalement pour la jointure d’une de ses articulations. Quitte à se plaindre des clichés, autant en faire un bon usage lui-même.

Il frappa une première fois, alors qu’autour de lui le reste du groupe se faisait un tourbillon de mouvement et de cris de ralliement. Le métal mordit la chair, se faufilant entre les plaques cristallines, et il réitéra le mouvement, un cri guttural s’échappant des confins de son poitrail, jusqu’à ce que la bête fasse un bond prodigieux, s’extrayant du milieu du groupe outragé. Vsevolod resta accroché tant bien que mal au corps de la bête, continuant à le fracasser chaque fois que possible. Quand cette dernière retomba au sol, dix mètres plus loin, elle le fit avec une patte en moins. Le corps et le visage de son assaillant étaient depuis longtemps couverts d’un épais liquide bleu, ce qui ne sembla pas le perturber. Il frappa une fois de plus, profitant du déséquilibre momentané de l’araignée pour tomber à son tour au sol, et viser le dessous de son corps. Il voulut se jeter sur elle, mais le reste du groupe se porta à son secours, une volée de sortilège embrasant d’une lueur rouge la carapace de la bestiole, et Vova en profita pour révéler le contenu de ses entrailles au monde. Elle s’effondra, et il eut à peine le temps de rouler loin d’elle, évitant de se faire écraser sous sa masse. Grognant et haletant, il entendit de manière distante les congratulations étonnés du reste des types. Lui qui avait voulu rester relativement discret, il devait avouer avoir échoué dans son entreprise.

Cela exigerait sans doute de lui qu’il prenne certaines mesures drastiques.
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