New Game [Solo - Quête Hebdo]

Des sueurs froides corrodèrent le crépuscule qui s’était installé en mon esprit. D’un éclat de sursaut,  je fus tiré de mon sommeil. Autant abasourdi que désemparé, je balayais d’un vif regard les alentours. Mes derniers souvenirs remontaient à cette mort certaine face à de sublimes enchanteresses, dans le donjon auquel j’étais entré avec trois anciens camarades d’un clan Yakuza. Pourtant, je me situais dans un confortable lit dans une pièce majoritairement blanche, une forte odeur de désinfectant vadrouillant dans les airs. Tous ces éléments portaient à croire que j’étais dans une salle d’hôpital, et que je n’avais point succombé à l’attaque des belles Succubes.

Ma mémoire me revenait toutefois progressivement. J’avais pu me rappeler de ce détail qui me semblait en premier temps anodin, ne pensant uniquement que mon imagination prenait le contrôle sur ma conception de la réalité. Ceci étant, je reconsidérais la véracité des événements étant donné que ma vie avait été épargné. À moins que tout cela n’avait été qu’un atroce rêve, je n’avais aucune conclusion logique à cette finalité.

Non. Si je ne délirais pas, tout ce passé n’était pas fictif. Cet écran bleu flottant était la preuve que la voix que j’avais entendu plus tôt n’était pas le fruit de mes illusions. Évidemment, il n’était pas possible d’interagir avec lui physiquement… Sans doute était-ce lié à la pensée ? … Rien d’étonnant.

Me redressant alors, j’ouvris la fenêtre à mes côtés pour prendre une bonne bouchée d’air frais. Étais-je atteint de folie ? Ou était-ce réel ?

L’aube se dressait à son fort, tandis que les oisillons n’émettaient pas le moindre son, se libérant tout juste des bras de Morphée. L’astre de feu combattait le temps pour s’élever, nous offrant alors cette fameuse notion à l’aide de sa lumière bienfaisante qui traversait l’espace pour instaurer ce cycle et nous couvrir de l’obscurité. Une routine des plus communes que voilà, mais ne perdant aucunement de sa splendeur malgré les jours et les mois qui s’écoulent.

Malheureusement, il m’était difficile d’admirer ce spectacle qui trouvait sa fin rapidement après sa venue. Des inspecteurs pénétrèrent la salle dans le but de faire le point sur la situation, étant donné que j’étais l’un des rares survivants de cette maudite excursion. Par ailleurs, ces individus vinrent aussi tester une nouvelle fois mon habilité en tant que chasseur, dans le cas où j’aurais subi une nette évolution à l’intérieur de l’instance, provoquant ce qu’ils appellent un second éveil. Les résultats se dévoilant négatifs, je pus assez vite retrouver le calme initial de ce début de journée.

Recentrant ma concentration sur ce menu qui n’avait pas l’air d’être visible par autrui, je naviguais à travers celui-ci avec sérieux. Ce qui m’interpela le plus était cette alerte à propos d’une quête que je devais compléter sous un temps imparti, ou bien j’aurais une peine pour ne pas l’avoir faite. Quelle genre de punition pouvais-je recevoir ? Si ce système était dirigé par la force m’ayant redonné vie, pouvait-elle me la reprendre ? Je n’osais pas imaginer les retours néfastes d’un abandon. Ceci dit, les demandes de cette mission n’étaient pas non plus une tâche aisée, au contraire. Pour moi, elles avaient déjà l’air d’être une corvée à la limite de l’impossible.

Outre cette notification, il était aussi possible d’apercevoir son statut ou un inventaire, comme dans un jeu vidéo. Oui, c’était exactement comme dans un jeu. Quelle idiotie… Mais si cela me permettait d’avoir une chance d’accomplir ma vengeance, je ne pouvais pas me plaindre. Je pouvais très bien être un personnage d’un jeu malsain des puissances divines ou autres, je m’en moquais.

Une infirmière débarqua peu de temps après pour vérifier mon état de santé, qui ma foi n’était guère défaillant. Suite à quelques brèves analyses, il m’avait été possible de sortir de cette zone après approximativement quatre heures.

Étant chasseur, ma récupération était meilleure que les personnes ne s’étant point éveillées. Il parut ainsi normale que je puisse quitter cet établissement médical seulement en quelques bonnes heures alors que j’avais perdu connaissance un peu plus d’une journée. Bien que j’étais exempt de travail pour le jour qui arrivait, j’allais tout de même faire un rapport sur ma situation au poste de police. Je pouvais en profiter pour annoncer ma journée de repos, surtout que l’annonce sur l’écran bleu virtuel était légèrement anxiogène.

« Salutation Joueur !

Te voilà confronté à une première quête pour ta propre gloire.
Termine-là, et tu recevras une récompense. Échoue, et tu recevras une punition héhé !
Dans tous les cas, tu ne vas pas passer à côté de ça, pas vrai ?
Voilà donc ce que tu dois accomplir en l’espace de quarante-huit heures :

- N’as-tu guère rêvé de pouvoir atteindre des cibles à distance en étant bien mouvementé ? Eh bien l’heure est venue pour toi d’accomplir une part de cet objectif en touchant 100 cibles sans t’arrêter ! De cela, je veux dire que tu ne peux absolument pas stopper tes jambes, ou tu devras tout recommencer ! Par ailleurs, il faudra garder une distance minimum de 20 mètres entre toi et tes cibles petit malin ! Bien entendu, tu auras un parcours à suivre, tu pourras remarquer tout cela une fois que tu auras toucher ta première cible huhuhu.

- Si tu rêves d’avoir un corps d’acier, je peux aussi t’y aider ! Déplace un poids de 100 kilogrammes  sur 1 kilomètre, facile non ? Oh, et bien sûr, tu n’as pas le choix du chemin non plus. Mais ne t’inquiète pas, le système que je suis fera en sorte que tu puisses suivre le circuit sans problème une fois que tu auras récupéré la masse qui sera apposée gentiment sur le passage.

Je crois en toi, Joueur !

Temps restant : 42 heures 38 minutes et 47 secondes. »

Sans prendre en compte l’écrit du système assez atypique, comme si je conversais avec quelqu’un d’assez sarcastique au final, je m’intéressais plus particulièrement aux demandes. Comment pouvais-je bien réussir ce qu’on me réclamer de faire ? Sans doute pouvais-je user de mon arme de fonction pour la première épreuve, mais le bruit d’un coup de feu n’était pas très subtil. Je pourrais user d’un silencieux, et cela réglerait le problème sonore, mais était-ce un choix judicieux ? Cela pouvait évidemment être dangereux. Si je venais à utiliser un jouet, un nerf par exemple, est-ce que cela compterait ? Mais était-il seulement possible d’atteindre une cible à plus de vingt mètres avec un tel arsenal ? Vu le temps qu’il me restait, je ne pouvais pas me tenter de privilégier la sécurité. Il suffisait que je me rende à un endroit assez isolé pour qu’aucun malheur ne survienne.

Concernant la seconde épreuve, je n’étais pas sûr de pouvoir la réaliser. Je me savais plus robuste et plus puissant que la normale dû à mon statut, mais de là à pouvoir déplacer un poids de cent kilogrammes et ce sur un kilomètre… C’était vraiment à la limite du raisonnable. Quoi qu’il en soit, je devais en premier temps m’équiper et passer l’objectif qui était selon moi le plus simple. J’aviserais pour le suivant.

Ainsi, j’étais passé au bureau de poste signaler ma petite absence, mais j’en profitais aussi pour récupérer ce qu’il me fallait sans trop l’annoncer.

Soupir.

Encore un délit de ma part. Je commençais à les cumuler depuis mon enfance. Fort heureusement, j’étais assez discret pour ne pas me faire prendre, auquel cas je ne saurais vraiment pas quoi faire. Étant donné que je ne pouvais plus compter sur mon père ni sa famille, si jamais j’avais le malheur d’être attrapé pour mes crimes, je ne pourrais qu’acquiescer sans résister.

Dans tous les cas, je ne pouvais plus reculer. Rejetant un œil sur les détails de cette quête de manière instinctive, je fis un nouveau soupir.

Pourquoi devais-je lire ce genre de textes si irritants ? J’avais l’impression qu’on se moquait de moi. J’aurais amplement mieux aimé une consigne concise comme il est fait habituellement dans les jeux vidéos. Était-il cassé ? C’était de la faute des Succubes pas vrai ? Mourir aux pieds de ces diablesses c’était vraiment… Brr. Oublions ça.

Si je voulais terminer cela dans les temps, je devais quitter cette ville qui n’était pas une zone adéquate pour l’épreuve des tirs. La région autour de Kamakura me semblait mieux en accord pour effectuer tout cela dans la plus grande des discrétions. Empruntant alors un train pour me mouvoir de Tokyo jusqu’à l’autre ville touristique aux airs mystiques.

Ce furent évidemment les collines qui m’intéressaient au sein de cette commune et ses alentours. En de telles places, je pouvais me déchaîner comme je le voulais. Ainsi, je me déplaçais jusqu’à trouver un endroit convenable. Vérifiant tout d’abord que la zone était vide de touristes, je sortis le matériel nécessaire par la suite. J’empoignais donc mon arme de fonction, me dégourdissant légèrement les bras avant d’effectuer un tir sur la première cible qui était affichée par l’étrange système qui était la cause de tout ce désarroi. Dès lors que le tir atteignit l’objectif, une alerte apparut pour m’indiquer cette réalisation. Un sur cent… Puis zéro sur cent.

Effectivement, lorsque l’on s’arrêtait de bouger, le compte redémarrait depuis le début. Ainsi, il fallait que je prenne des mesures dans le but de pouvoir compléter la mission sans trop de difficultés inutiles. De cet état d’esprit, je m’équipais d’une ceinture me permettant d’accrocher plusieurs cartouches sur moi, tandis que je laissais aussi grand ouvert le sac au cas où je n’aurais pas assez de munitions pour tout toucher.

Dès que j’arrivais à atteindre une cible, une autre apparaissait dans mon champs de vision. Le parcours que mentionnait le système se dévoilait donc petit à petit. Il fallait rester à l’affût pour ne manquer aucun des objectifs. Après avoir pris un gros soupir pour me mettre en condition, je démarrais enfin cette session.

Temps restant : 40 heures, 46 minutes et 12 secondes.

Start. Les premières marques à atteindre étaient assez grosses, ce qui facilitait grossièrement le travail. Or, à chaque palier de dix, ces étranges cerceaux pleins se réduisaient en taille, les rendant plus facile à manquer. Lors de la vingtaine, je commençais à ne plus pouvoir faire mouche dès la première balle. Vu l’espace dans lequel je me trouvais, je pouvais tout de fois me permettre de courir autour de ma proie inanimée. Ne prenant nullement attention quant aux cartouches vides que je retirais afin de les remplacer, je les disposais brusquement derrière moi avant de continuer ma course effrénée.

Trente-trois, trente-quatre… Où était le suivant ? J’avais fini par perdre de vue la suite du circuit. Cependant, je ne pouvais pas m’arrêter pour autant. Ainsi, je trottais dans le coin, cherchant du mieux possibles cette furtive cible, n’oubliant pas de lever les yeux vers les cieux ou vers les feuillages des arbres. Après quelques minutes, j’avais enfin pu trouver ce que je recherchais, qui se trouvait justement caché par les végétations.

J’étais désormais plus attentif, ne manquant aucun détail. Cinquante. Soixante. Soixante-dix… Surprise que voilà après avoir atteint cet échelon. Les cibles bougeaient… Déjà que la zone de touché s’était grandement réduite, après ne plus que la taille d’un ballon rond, voilà que ces choses se mouvaient ! Avant de commencer ce défi, j’étais confiant en mon adresse. Je pensais que celui-ci me permettrait d’accomplir cette première adversité sans trop d’encombres. Pourtant, la difficulté de cet exercice était plus élevée que certaines activités d’entraînements de la police ! Non, elle était largement plus compliquée que celles-ci !

Je commençais par ailleurs à perdre mon souffle à courir dans tous les sens pour rattraper et retrouver mes cibles, mais j’avançais peu à peu. Quatre-vingt… Quatre-vingt dix… Plus de munitions. Plus aucune munition. Il fallait croire que je n’avais pas préparé un stock assez gros pour cela… Après tout, je ne pensais pas manquer autant de fois ces cercles virtuels. Il me manquait toutefois encore deux pauvres points pour terminer cette épreuve… Je ne pouvais pas échouer là-dessus ! Je perdrais trop de temps si jamais je décidais de reporter cela une fois avoir récupérer davantage de projectiles. Non, il fallait que je trouve autre chose.

Un éclair de génie me parvint alors. Et si j’utilisais de simples cailloux pour atteindre ces cibles ? Rien n’était dit que je devais forcément les toucher avec l’aide de mon arme de policier. De cet état d’esprit, je pus continuer, attrapant au passage quelques pierres dans le but de les projeter en direction des anneaux. Je procédais ainsi sans m’arrêter, espérant ne serait-ce que caresser ceux-ci par chance.

Quatre-vingt dix neuf. Bingo. Mon idée fonctionnait, mes mais jambes commençaient aussi à faiblir. C’était bien plus physique que je ne l’aurais cru. Néanmoins, je redoublais d’efforts dans l’espoir de terminer ce calvaire. Et finalement, cent ! M’écroulant alors au sol, perlé de sueurs, je récupérais lentement mon souffle d’un air hagard. Adressant alors un léger regard sur la notification, je pus finalement être satisfait.

« - Et hop : 100/100 !
- Il te reste encore 1 kilomètre à parcourir avec le poids héhé, trouve-le aux alentours de la ville.

Temps restant : 38 heures, 05 minutes et 51 secondes. »

Quel enfoiré. Je peux échanger cette abomination de système avec un Hololive ? Au moins, ça serait une mignonne demoiselle qui parle… Dans tous les cas, actuellement, je me devais de retourner à la zone urbaine, et ce même si je ne me sentais pas prêt d’entamer l’autre défi. Après tout, j’avais faim. J’étais si pressé que j’avais oublié que je ne m’étais pas véritablement ressourcé pendant plus d’une journée. Je pouvais aussi en profiter pour analyser plus en profondeur ce qu’il se passe, et étudier à la possibilité d’un second éveil malgré le résultat qui semblait indiquer le contraire. Soupir…

Après avoir récupéré toutes les cartouches vides que j’entreposais dans mon sac, je pris la direction du retour. Il fut simple de remarquer la présence de ce fameux poids de cent kilogrammes grâce à la flèche d’une teinte dorée qui pointait sur lui depuis les airs. Évidemment, les quelques passagers ne remarquaient aucunement le matériel et vaquaient à leur occupations. Par simple curiosité, je m’approchais de la grande masse semblable à un énorme pneu de quatre-quatre, rattaché à un fil. Attrapant l’attache, je testais sa solidité afin de voir si j’avais éventuellement davantage de préparation à effectuer. Ceci étant, la corde avait l’air assez solide pour supporter la pression, ce qui me soulagea légèrement. J’avais au moins ça de moins à me préoccuper.

Concernant l’objectif en lui-même, je songeais encore à comment procéder. Si l’objet avait l’air d’un pneu commun, il était indéniablement plus lourd. Sans tactique pour mouvoir l’équipement du point A au point B, je ne savais réellement pas comment je pouvais accomplir cette mission. Ce que je redoutais était que les subterfuges ne puissent contribuer à l’avancée de la quête… Après tout, le système avait blagué sur avoir un corps de rêve, et user de ruse n’allait pas aider à atteindre ce genre de physique… Et, c’était aussi un bon moyen pour moi de commencer l’entraînement que je souhaitais faire avant de pénétrer ce donjon fatidique.

Quoi qu’il en soit, là n’était pas l’heure de s’y essayer. En premier temps, je voulais me nourrir, et pour ce faire je me dirigeais vers une simple brasserie pour commander un repas plutôt copieux. M’armant de mon fidèle téléphone, je fis diverses recherches concernant le double éveil, sollicitant plus particulièrement les données sur des cas similaires au mien. Bien que la plupart des informations avaient l’air d’être filtré, il existait bien des individus ayant eu un accident semblable à celui du donjon avec les enchanteresses. Même si les rapports n’indiquaient pas clairement ce qu’il s’était passé, ces ressemblances ne devaient pas être anodin.

Ceci dit, je n’avais pas véritablement eu d’éclaircissements sur mon statut de joueur. Les quelques liens qui me semblaient pertinents m’avaient simplement redirigé vers une page descriptive d’un jeu vidéo plus ou moins connu. Étais-je un cas à part ? Je ne comprenais pas pourquoi mon second éveil serait porté sur un aspect jeu vidéoludique étant donné que je n’avais pas une affinité des plus poussées avec cela. Certes, comme un peu tout le monde, j’avais pu jouer à quelques jeux et ce malgré mon passé, mais c’était tout. Non, si d’autres énergumènes étaient dans un cas identique au mien, peut-être qu’ils se montreraient aussi discrets que moi. Après tout, un chasseur qui pouvait évoluer en permanence et ce jusqu’à une limite inconcevable était tout aussi impensable. Nombreuses seront les personnes cherchant à éliminer ce fameux guerrier dans le but de déceler ses secrets… Il devait bien y avoir des cas d’évolution, en renforçant son physique par exemple, mais ce qu’offrait ce système était bien plus gros.

Pour ce qui était de ce dernier, je n’arrivais toujours pas à croire la véracité de ses propos. Même si j’avais pu voir et toucher les cibles, et examiner cette masse en détail… Allais-je réellement être récompensé pour terminer cette quête ? Ou était-ce simplement une manière de me mener en bateau ? Et concernant cette punition, quelle était-elle ? J’aurais aimé avoir un système qui m’indique plus clairement les choses. Allais-je décéder si je ne réalisais pas tout cela ? Après m’avoir sauvé, je trouvais cela peu probable mais je n’étais pas prêt à prendre le risque… Puisque j’étais parti sur ma lancée, autant tout finir. Avec un peu de chance, j’aurais plus d’informations les prochaines fois. À moins que…

« Hé, système. Quelle est la punition d’un échec de quête ? », demandais-je tout bas.

Sans réponse. Évidemment. Qu’importe si le système était sarcastique, enfantin et irritant, ce truc m’avait sauvé. Je pouvais me montrer un minimum patient avec lui.

Très bien. J’avais fini de déjeuner, et avec tout ce temps à chercher des informations, je m’étais aussi suffisamment reposer pour continuer cette missive. Il était temps de reprendre les activités.

Temps restant : 34 heures, 41 minutes et 03 secondes.

Je faisais donc de nouveau face à ce pneu d’une lourdeur accrue… Vraiment, comment allais-je faire ? Étais-je réellement sensé tirer ce poids à l’aide de la corde ? Il devait forcément y avoir un autre moyen de passer cet objectif, pas vrai ? Ou peut-être était-ce tout simplement normale pour un chasseur ? Après tout, même parmi les rangs E, je n’étais que médiocre. M’enfin, je ne pouvais pas me permettre de m’éveiller trop longtemps devant la difficulté de l’épreuve. Même si j’avais largement le temps de l’accomplir, je préférais être débarrassé de cette anxiété de pouvoir échouer à la mission et ainsi perdre la vie.

Empoignant alors le fil à deux mains, je tirais de toutes mes forces dessus de sorte à déplacer la masse d’une centaine de kilogrammes. Même si c’était difficile, j’arrivais au moins à mouvoir ce caoutchouc magique. Après m’être assuré de cela, je fis un bref balayage du regard aux alentours afin de profiter d’un moment de solitude pour avancer.

Je pus remarquer cette fois-ci une traînée lumineuse sur le sol lorsque je bougeais le matériel, et il était simple de comprendre que je devais suivre cette lignée. Suant alors sang et eaux, je m’avançais sans me plaindre, m’arrêtant tous les dix mètres pour m’assurer qu’il n’y ait aucun curieux sur les lieux, et pour reprendre mon souffle. Cet effort n’était pas insurmontable, mais je n’allais sans doute pas terminer le défi en une journée.

Haha… J’étais vraiment faible pour un chasseur ayant subi un double éveil ! Alors que les plus puissants pouvaient menacer des nations entières, un simple poids de quelques kilogrammes de rien du tout me stoppait. Que c’était risible. Je ne pouvais réellement qu’en rire de cette merde ! Huff, huff…

Je vins alors me poser plus longuement sur le bas côté. J’avais besoin d’un peu plus qu’une bonne dizaines de minutes pour me revitaliser. Ceci étant, même si je savais que cela allait me faire du mal, je vins observer l’avancement de ma quête.

«  - Et hop : 100/100 !
- Il te reste encore 480 mètres à parcourir avec le poids héhé.

Temps restant : 30 heures, 01 minute et 51 secondes. »

J’aurais aimé pouvoir me rassurer en me disant que j’avais parcouru plus de la moitié de la distance, mais le pire restait à venir. Jusque là, le terrain était assez plat… Mais dès à présent, une légère pente devait être surmontée. Même si l’inclinaison était faible, l’effort que je devais fournir était bien plus important que la normale.

Après m’être calmé les nerfs un certain moment, je vins à m’attacher au pneu à l’aide de la corde avant de reprendre l’exercice. Je ne savais pas si cette façon de tirer était meilleure qu’une autre, mais je pouvais au moins avancer et savoir où était le point qui me ferait basculer. J’avais pour idée de me stopper juste avant cet endroit pour ne pas que le poids ne fasse une chute en arrière alors que je serais au chaud dans un lit. Ainsi, avec cette tactique, j’avais pu gagner plus d’une centaine de précieux mètres avant que je ne rebrousse chemin vers la ville dans le but de rentrer chez moi via un transport en commun.

La première chose que je fis une fois rentré dans mon logis fut de laver mon corps qui dégageait une forte odeur de transpiration. Suite à cela, je me posais et fixer bêtement le salon après un léger soupir. Je m’étais enfin posé chez moi après toute cette histoire. Maintenant que j’étais plus serein, que j’avais un peu plus de recul sur la situation, je remis en ordre mes pensées.

J’étais mort, puis j’avais ressuscité ? Ou avais-je plutôt survécu ? Comment le donjon s’était-il terminé après que je ne m’évanouisse ? Je doutais avoir agi après avoir perdu conscience, ce qui signifiait que les jolies créatures diaboliques avaient tout simplement disparu, si elles n’avaient pas succombé face à l’éclosion de mon double éveil.

Quoi qu’il en soit, je m’étais réveillé, et je pouvais contrôler grossièrement un interface qui pouvait m’aider à représenter mon statut, ainsi qu’un inventaire… ? Par ailleurs, comment celui-ci fonctionnait-il ? Je m’étais précipité à la vue de cette quête qui me semblait urgente, mais j’avais maintenant du temps pour étudier ce phénomène.

Après un cuisant échec d’appel vocal, j’essayais une fois encore de toucher cet écran flottant dans le doute. Je fus quelque peu abasourdi lorsque ma main traversa les dimensions, la sensation étant spécifique tandis que le visuel l’était tout autant. Cette surprise me força à retirer mon bras avant qu’un drame ne puisse se produire.

Depuis l’avènement du mystique, ce monde ressemble de plus en plus à un jeu vidéo ou à un univers tiré d’un manga… C’est fou.

Déglutissant alors un coup, je plongeai de nouveau ce même bras dans l’inventaire dans le but de me familiariser avec la sensation. Je ne saurais décrire exactement ce que je ressentais. Peut-être était-ce un mixte entre une substance visqueuse, aqueuse et pâteuse ? J’étais certain que l’impression serait identique si j’enfonçais un membre dans un Slime de jeu vidéo, mais vu que je n’en avais encore jamais rencontré, ni en donjon ni en vrai, je ne pouvais pas l’affirmer totalement.

En tout cas, je fus de nouveau ébahit de pouvoir empoigner deux items dans ce sac virtuel. Ainsi, il n’était pas vide. Si j’avais davantage fait attention aux icônes, sans doute aurais-je remarqué les deux objets, mais ma concentration n’étant pas au summum, j’avais rapidement omis ce détail lorsque j’actais pour ouvrir l’inventaire.

Je tirai donc les fameux équipements de cet espace de manière à pouvoir avoir un visuel complet sur eux. Un anneau, et une poing américain avec une lame attachée… Un poing-lame ? Je pus percevoir les caractéristiques de l’armement une fois m’être un peu plus attardé dessus. Cette dernière semblait me procurer une considérable amélioration de mon attaque une fois équipée… Je n’avais pas encore connaissance du fonctionnement de ces statistiques, mais je pouvais déjà m’y faire une idée globale.

Ceci dit, je n’avais pas les prérequis nécessaires pour prétendre à l’utilisation de cette arme. Sans doute pouvais-je la tenir dans mes mains, mais elle ne me serait d’aucune utilité lors d’un combat. En revanche, l’anneau m’était accessible dès maintenant, ce qui me procurerait une élévation de mon agilité. Celle-ci doublerait avec l’accessoire. Évidemment, je n’attendis pas avant de l’enfiler. Même si je ne remarquais pas les changements tout de suite, cela serait mieux de l’équiper à ce moment que d’attendre une mauvaise surprise. Bref, mon inspection sur l’inventaire était terminée, et je y avais reposé le poing-lame inutilisable pour l’heure.

Après m’être ressourcé pour le soir, je continuais à récolter les informations qui me semblaient nécessaires sur internet, concernant les chasseurs et tout le reste avant de me poser dans mon lit. Si tout ça n’était qu’un mauvais rêve, le système n’apparaîtra point le lendemain. Toutefois… Ce statut particulier me permettrait d’avoir une bonne chance de prendre ma revanche. Moi qui n’était clairement pas assez puissant pour me confronter au clan de mon père pouvait désormais le devenir… C’était vraiment un cadeau du ciel.

Le lendemain, le système n’avait agréablement pas disparu. Je m’étais fait à l’idée que tout cela n’était pas une vulgaire connerie. Ainsi, après avoir pris un bref petit-déjeuner, je me mis en route pour terminer le second objectif de ma quête en cours.

Traversant de nouveau Tokyo pour atteindre Kamakura, je n’attaquais pas directement le poids de cent kilogrammes, préférant tout d’abord m’échauffer de longues minutes avec une bonne course. Ce n’était qu’après que mon corps se sentait prêt que j’allais attaquer la partie la plus difficile de cette épreuve. Avant l’arrêt, la pente était plutôt obtuse, mais celle-ci prenait alors une tournure radicale lors de ma reprise.

Ce n’était pas un angle droit, mais peut-être était-ce aux alentours de 130 ou 140 degrés. Évidemment, je devais toujours suivre le chemin que le système me dévoilait lorsque je m’efforçais de déplacer le pneu. Ceci dit, cette fois-ci, il ne suffisait qu’un relâchement pour que je me fasse emporter par l’inertie et que je dégringole en arrière avec le matériel. Je ne voulais pas passer trop de temps dessus, déjà qu’il commençait à m’en manquer. Ceci dit, c’était encore largement raisonnable et réalisable.

Temps restant : 14 heures, 56 minutes et 10 secondes.

J’étais chaud. Je pouvais le faire avant de passer les 14 heures. C’était mon objectif personnel. Avançant alors lentement, je me rapprochais peu à peu du but, percevant même la flèche dorée qui indiquait le point final à atteindre. Serrant des dents, je ne voulais pas tomber, alors je continuais. Je continuais… Non. Malgré moi, je m’étais stoppé. Même si j’avais pu me stabiliser pendant un court instant, je fis entraîné par le poids au moment suivant, me faisant glisser encore plus bas qu’au stade de départ de cette journée.

D’accord… Peut-être que ce n’était pas possible pour 14 heures, alors j’allais viser 13.

Plein de confiance, je me remis en route, retraversant cette montée difficilement. Pourtant, une fois encore je ne pus atteindre le sommet avant que je ne doive reculer à cause de mes faibles performances. J’étais vraiment trop faible physique… Je pouvais comprendre que les donjons de rang E me posaient déjà quelques soucis. Toutefois, je n’abandonnais pas comme cela. Si j’échouais, j’allais recommencer dans la foulée…

« - Et hop : 100/100 !
- Oh, second objectif accompli : 1 km / 1 km ~

Bien joué, Joueur !
Tu es éligible d’accéder à la dernière partie de cette quête !

- N’as-tu pas rêvé de t’entraîner sous une cascade ? Eh bien, à toi l’honneur de méditer 5 heures d’affilée en dessous !

Courage Joueur, la récompense est à ta portée de main !

Temps restant : 9 heures, 48 minute et 33 secondes. »

Huff… Huff… Franchement… Vas bien te faire foutre.

Passer cette pense s’avéra être un défi plus compliqué que je ne le pensais. Mainte et mainte fois je voyais la fin, juste avant de lamentablement avoir une faiblesse qui me causa du tort. Résultat de tout cela, j’avais des blessures partout, dû à ces chutes, et j’étais exténué. Et surtout, j’avais faim.

Me donner une nouvelle épreuve cachée suite à l’accomplissement des deux premières, j’avais la confirmation que ce système se foutait de ma gueule. En plus de cela, il ne me restait pas longtemps avant que je n’échoue à cette quête. Ainsi, je n’avais pas le droit à l’erreur. J’espérais au moins que la récompense soit bonne, ou bien je risque fort de perdre mon mental face à cette infamie.

Allongé sur le sol, le pneu à la lourdeur accrue disparut peu après que je réussis à monter cette pente avec. Malgré le temps qui me pressait, je pris le soin de récupérer mon souffle et mon énergie sans trop me soucier des événements. Ce n’était qu’une fois que je me sentais mieux que je me redressais pour finalement me rendre vers cette fameuse cascade qui était tout de même assez éloignée d’ici. Je n’avais réellement qu’une seule et unique chance de passer cette épreuve… Peut-être était-ce fait exprès au final.

Fort heureusement, la chute d’eau n’était pas aussi puissante que je ne l’imaginais. Il était vrai qu’avec les divers bandes dessinées que j’avais lu, je me voyais combattre une puissante eau qui arracherait ma peau au passage, mais ce n’était pas le cas et bien plus réaliste. Par précaution, je retirais tout de même mes habits avant de m’installer sous l’écroulement aqueux, et ce après avoir pris des mesures pour habituer mon corps à la température du liquide.

Cinq heures… Il ne fallait mieux pas que j’y pense. Je vais méditer tel un puissant moine, et je ne me retirerais qu’une fois qu’une alerte sonnera dans mon esprit. C’était mieux de procéder ainsi que d’angoisser sur le temps qui restait.

Cependant, même si je partais au premier abord dans cet état d’esprit, il en fut tout autre au bout d’un certain moment. Je commençais à la fois à perdre patience, mais aussi à faiblir face à ce torrent d’eau qui me tombait dessus. Toutefois, si c’était assez pour faire vaguement vaciller ma concentration, je pus la recentrer juste après avec quelques efforts mentaux.

Je suis un caillou inamovible… Non, je suis la nature, je suis l’eau… Oui, je suis l’eau… Je suis une continuité de cette cascade, une telle pression ne me fait rien. Je suis cette cascade… Et j’ai aussi fortement envie d’uriner… Après tout, je suis la cascade, et l’urine est aussi un liquide, donc l’urine est de l’eau… ? Je suis de l’urine… ?

Oui, je n’arrivais plus à me canaliser sur mon objectif tandis que mon corps s’était déjà engourdit. J’étais prêt à lâcher… Non, je ne pouvais juste plus tenir. Ainsi, je sortis de dessous la chute d’eau, l’air un peu abattu. J’étais à la fois en colère contre moi et irrité contre mon père. Il était à l’origine de tout, donc c’était de sa faute. Et donc, quelle sorte de pénalité allais-je avoir ? Après tout, ce n’était pas obligatoirement la mort…

« - Et hop : 100/100 !
- Oh, second objectif accompli : 1 km / 1 km ~
- 5h / 5h, ma foi !

Toutes mes félicitations Joueur !
Vous avez brillamment passé les épreuves de cette quête hebdomadaire ! Le système que je suis vous fournira une récompense adéquate une fois la prise en compte de ces efforts !
À très bientôt ! »

… Pourquoi ne m’as-tu pas averti plus tôt ? Depuis combien de temps étais-je sous cette cascade exactement ? Combien d’heures de ma vie avais-je perdu ? Pitié, faites que je puisse changer ce système comme récompense…

Au moins, je n’avais pas échoué. Après un bref calcul, il m’avait été possible de savoir que j’avais médité environ une heure et demie supplémentaire comparé à la demande initiale. Moi qui comptais sur le système, celui-ci s’était arrangée pour que j’en suis grandement insatisfait… Qu’importe. J’allais avoir un présent de sa part, et sans doute allait-ce m’être utile pour la suite des événements, ou en tout cas je l’espérais. Avec tout cela, je crois bien avoir mérité au moins un barbecue en rentrant…

Un sourire satisfait apparut alors sur mon visage avant que je ne me rhabille. En toute franchise, je n’étais pas certain moi-même de pouvoir faire ce que j’avais effectué ces deux derniers jours. Sans doute étais-je déjà devenu plus fort… Mais si je pouvais gagner des niveaux et m’améliorer plus facilement et de manière plus brutale… Héhéhé.

Je tiens là un moyen de me venger de tous ceux inscrit dans mon Death Note.