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Vsevolod Yegorovich
Vsevolod Yegorovich
Messages : 7
Date d'inscription : 06/12/2020

Tradition et modernité [quête hebdomadaire/solo] Empty Tradition et modernité [quête hebdomadaire/solo]

Sam 26 Déc - 13:32
C’était dans ces moments-ci qu’il avait réellement le mal du pays, et qu’il voyait clairement les effets de l’Histoire. Le Japon et la Russie, divisés à cause de conflits armés, puis plus diplomatiques et territoriaux, étaient aussi divisés du point de vue de la tradition. Là où son pays avait relativement bien réussi à conserver ses propres traditions face à l’avancée cannibale de la mondialisation américaine, le Japon, pays vaincu et toujours occupé aujourd’hui, ne s’en sortait pas si bien. C’était partout un déferlement vulgaire et ostentatoire de guirlandes lumineuses, de décorations gigantesques et d’invitations à la consommation de masse. Il détestait tout cela, sans doute plus parce que c’était une période d’activité grouillante pour ses congénères, et qu’il ne pouvait pas visiter le moindre centre urbain sans en être la première victime. Il était donc assez normal qu’il se soit au final replié dans son domaine, préparant des célébrations plus proches de ses propres croyances. Si lui-même ne pratiquait pas le jeune de la Nativité, ses propres penchants mystiques mêlant allégrement traditions païennes, héritage orthodoxe et règles personnelles, il avait tout de même prié à deux ou trois reprises, chose qu’il ne faisait plus depuis qu’il avait échappé à la surveillance de sa mère. Il se gratta la barbe. Finalement, il n’était pas beaucoup plus proche des traditions authentiques et de l’expérience spirituelle millénaire que les humains qui erraient de magasin en magasin.

« Et toi, t’en penses quoi de tout ça ? fit-il à son prisonnier du moment, soigneusement choisi parmi son stock restant. De Noël, je veux dire, des fêtes, des traditions, enfin tu vois. »

Il quitta des yeux le gigantesque hachoir de boucher qu’il aiguisait depuis cinq minutes déjà, levant le regard vers le type. C’était un employé d’un bar relativement populaire d’une ville de la région. Ses cheveux étaient longs, et tombaient en ondulations artificielles et délavées sur les côtés de son crâne, encadrant une barbe certes relativement peu fournie, mais tout aussi soigneusement travaillée. Il était grand, pour un japonais, avec un corps fin et élancé. Quand Vsevolod l’avait vu la première fois, le parallèle avec la figure de Jésus lui avait directement semblé évident : il était là, avec comme vin de messe ses cocktails colorés, et comme ouailles les clients qui venaient s’échouer sur son zinc, leurs lèvres tremblantes égrenant parfois des confessions hésitantes. Le capturer avait été relativement simple, et il était maintenant occupé à considérer la meilleure manière de les rapprocher tout deux du divin, de s’exalter par le sacrifice de l’agneau. L’autre ne lui répondit pas, même après lui en avoir laissé largement le temps. Ses yeux hagards, encore abrutis par les sédatifs lui jetèrent un regard bovin, le fixant sans vraiment bien le voir. Vsevolod haussa les épaules, se contentant à la place de la conversation attendue d’entamer un petit air de son pays, louant la grâce des saints et du Seigneur. La vraie question, se dit-il finalement, était de trouver un moyen de faire avaler sa propre chair à son Jésus personnel. La communion ne saurait être complète et valide sans cela.

Estimant finalement que son tranchoir était suffisamment coupant, il se releva et se dirigea vers le type. Il avait d’abord hésité à appliquer sa méthode classique, à garroter ses membres puis à les trancher. Cela permettait d’extraire facilement de bons morceaux de viande, sans pour autant mettre en danger la vie de sa victime. Mais il ne s’agissait pas ici d’opérer comme un simple boucher, mais plutôt d’officier soigneusement pour que le rituel soit auréolé de la toute la superbe qu’une telle occasion méritait. Il étudiait plus soigneusement le corps de son captif. Peut-être pouvait-il à la place racler un peu de sa viande, extraire de ses flancs quelques juteuses lamelles. L’opération était risquée, et demanderait beaucoup de doigté. Il hésita, et quand enfin il lui sembla qu’il avait trouvé la solution, le système se rappela à son bon souvenir, interposant entre lui et son futur repas son écran bleu. Une autre semaine, une autre quête, et encore une fois, une carricature de Noël.

Vova soupira, et rebâillonna son invité, avant de le ramener dans la cave soigneusement dissimulée dans laquelle il conservait ses prises les plus précieuses. Il ouvrit une porte épaisse, repositionnant soigneusement le corps encore pâteux dans la cellule. Avec toute cette agitation, il ne lui avait pas changé son pot-de-chambre. Il lui jeta un dernier coup d’œil, et haussa les épaules. S’il pouvait monter en croix et accomplir toute cette pompe sacrée, c’était là un bien plus modeste sacrifice, auquel il consentirait bien volontiers. Il remonta à l’air libre, camouflant de nouveau soigneusement l’entrée de son complexe souterrain, et considéra sa nouvelle quête, avant de se harnacher convenablement, profitant de ses nouvelles statistiques. Grinçant des dents, anticipant déjà la réalité de l’objectif idiot qui lui était imposé, il sortit de sa maison. Devant lui s’étendait un portail menant à un donjon, la faille vibrant d’une lumière sale et bleuâtre. Il s’y engouffra, pressé de pouvoir se concentrer de nouveau sur des activités plus agréables.
Vsevolod Yegorovich
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Sam 26 Déc - 13:33
La première chose qu’il remarqua fut le vacarme ambiant. Il se trouva dans une large pièce. Une très, très large pièce, surmontée d’un plafond si haut qu’il semblait au premier examen être un ciel marron. Et malgré le fait qu’il se rende parfaitement compte que les murs de cette dernière étaient facilement aussi éloignés de lui que le plafond, il pouvait facilement discerner sur ces derniers les bas-reliefs qui les décoraient. C’était des représentations de petits lutins, d’elfes coiffés de hauts bonnets, de rênes et de sapins. Toute l’imagerie classique des fêtes, si ce n’était qu’elle semblait ici déformée. Les elfes possédaient de longs crochus, et les lutins bossus et tordus chevauchaient des rennes émaciés aux sabots tranchants. Il se frotta les yeux, perturbé par ce spectacle. Le simple fait de contempler ces fresques faisait naître en lui un puissant mal de tête. Il y avait dans ces lieux quelque chose de foncièrement mauvais, quelque chose de corrompu et de corrupteur, qui altérait autant les dimensions que les dimensions classiques. Et toujours ce vacarme incessant, qui semblait venir de partout et de nulle-part à la fois, comme si des milliers de voix discordantes s’étaient unis pour chanter en chœur un hymne impie, accompagné du bruit rythmique d’autant d’outils affairés à il ne savait quels noirs desseins.

Le chasseur passa le dos de sa main sur son nez, avant de l’observer : quelques gouttes d’un sang rougeoyant maculaient sa peau. Il grogna, et secoua la tête. Il devait faire vite, et s’acquitter rapidement de la basse besogne que le système lui avait confiée. Il choisit au hasard une direction, et avança droit devant lui, la pièce gigantesque totalement vide ne lui donnant aucune indication sur le chemin à prendre. Il avança pendant un temps qui lui parut infiniment long, suffisamment long pour que les enfants de ses enfants puissent avoir des enfants. Heureusement, il ne s’était pas encore accouplé, et, plus important sans doute, il eut encore une fois l’intime conviction, sans trop savoir d’où elle venait, que sa perception des dimensions était faussée. Il finit tout de même par atteindre une vaste porte, grande et large et titanesque et faite d’un bois luisant et épais, qui apparut devant lui en flottant à quelques centimètres du sol. Il voulut peser sur elle, comprenant facilement qu’elle contenait la solution à ses problèmes existentiels, mais elle refusa de s’ouvrir. Jurant intérieurement, il redoubla d’efforts, ahanant comme un bœuf tirant sa charrue, jusqu’à ce qu’une voix grinçante vint percer ses tympans, le tirant de la singulière folie qui avait assailli ses sens :

« Ho ho ho ! Que fait un petit garnement comme toi ici ? Ne sais-tu pourtant pas que les vilains enfants ne reçoivent pas de cadeaux ? »

Le joueur se retourna, bondissant prestement et tirant son arme au clair. Peu de créatures pouvaient communiquer aussi clairement, dans les donjons, et celles qui le faisaient n’étaient généralement annonciatrices de balades champêtres paisibles et détendues. Devant lui se tenait une apparition diabolique, un être aux griffes monstrueuses et au cuir bleuté, haut de facilement trois mètres malgré sa stature voutée. Ses deux yeux brillaient comme des tisons incandescents, et le lourd manteau rouge à fourrure qui couvrait sa masse disgracieuse ne faisait rien pour rendre son apparence plus tolérable. Couvert de lourdes chaînes, ce croisement entre un yéti et un satyre le contemplait, immobile, un sourire mauvais écartant ses lèvres gercées, dévoilant deux rangées jaunies de crocs irréguliers. Au moins son apparition avait-elle fait cesser le bruit jusque là continu qui avait envahi son espace sonore. Vsevolod prit une grande inspiration, cherchant à retrouver ses esprits. Il avait de toute évidence en face de lui le propriétaire des lieux, et la cible de sa quête hebdomadaire.

« On ne se fait pas vraiment de cadeaux de là où je viens, répondit-il sur un ton neutre. »

Certains le faisaient, pour le nouvel an. Pas sa famille. Il n’eut cependant pas le temps d’expliquer plus avant son raisonnement. Sa dernière déclaration avait visiblement plongé la créature dans une colère noire, car il put rapidement voir cette dernière se redresser, son corps se dépliant comme un origami sinistre, les chaines qui entouraient sa forme monstrueuse se déployant autour de lui comme autant de serpents vengeurs. Il les attrapa de ses longs doigts griffus, et les fit claquer au sol d’un mouvement sec, le fouet improvisé laissant sur le bois verni de longues et profondes entailles. Le rictus pourtant déjà inquiétant de la créature s’était mué en une grimace de colère, et elle siffla, sa voix sortant de sa gueule en un avertissement courroucé :

« Pas de cadeau ? Vilain, vilain petit garnement ! »

A ces mots, elle bondit dans sa direction, et d’un mouvement rapide du poignet, envoya dans sa direction ses chaînes.
Vsevolod Yegorovich
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Sam 26 Déc - 13:33
Vsevolod jura, maudissant dans un même éclat de pensée révolté le système et le monstre de Noël, leurs hypothétiques géniteurs, et leurs deux lignées dégénérées. Esquivant de justesse l’attaque, il bondit sur le côté, avant de se réceptionner tant bien que mal d’une roulade. Derrière-lui, l’impact terrifiant du coup ébranla le sol en une gigantesque secousse, projetant dans un rayon de plusieurs mètres une pluie d’échardes. Le joueur se releva rapidement, et contre-attaqua, se ruant à son tour à l’assaut. Il était normalement dans sa nature de rester prudent et d’étudier les capacités de ses adversaires, mais la situation présente, en plus d’avoir fait naître en lui un profond sentiment d’exaspération, était tout à fait claire : il ne gagnerait rien contre un adversaire doté d’une telle allonge à rester éloigné de lui. Il lui fut difficile dans sa précipitation d’éviter de totalement s’exposer. Si au corps-au-corps, l’espèce de père-fouettard ne pouvait pas facilement faire usage de ses chaînes, Vsevolod ne doutait nullement de ses capacités physiques. Sa propre bouche s’ouvrant en un cri de guerre primal et furieux, il abattit sur son ennemi sa hache, visant le milieu de sa cage thoracique. La manœuvre était simple, et il espérait ainsi enfoncer sa cage thoracique jusque que dans ses poumons. Le résultat fut moins que satisfaisant, et son adversaire encaissa le coup presque sans broncher, la seule indication que ce dernier n’avait pas été totalement inefficace se trouvant dans la mince gerbe de sang bleuté qui gicla de la plaie. La créature répondit au cri du guerrier par son propre beuglement, et l’expédia de nouveau loin d’elle d’un revers puissant de la main.

Vsevolod valdingua dans les airs, s’écrasant cette fois avec beaucoup moins de grâce, glissant lors de sa chute sur le parquet sur plusieurs mètres, avant d’enfin parvenir à se stabiliser. Il n’eut pas le temps de se relever, et seul son instinct affuté lui permit d’échapper à l’assaut renouvelé de son adversaire. Il poussa en un mouvement coordonné sur ses bras et jambes, se déplaçant tant bien que mal. Une seconde plus tard, et le cratère nouvellement formé par l’impact des chaines aurait contenu les restes pulvérisés de son corps. Il se releva, et chargea de nouveau. Si la bête était visiblement dangereuse aussi bien de près que de loin, Vsevolod ne disposait pas des mêmes atouts, son seul moyen d’attaque se trouvant être son arme. Plus ennuyeux encore, son adversaire avait réalisé ce fait, et semblait insister pour le tenir à distance et profiter de son avantage naturel. Il allait donc falloir, s’il voulait s’en sortir intact, faire preuve d’un peu de créativité. Couvrant aussi rapidement que possible la dizaine de mètre qui le séparait de sa cible, il resta vigilant, braquant son regard sur elle, guettant n’importe quel mouvement qui annoncerait le renouveau de ses attaques. Cette dernière était pour l’instant occuper à tirer vers elle ses lourdes chaines, sa force titanesque lui permettant de s’acquitter de cette tâche bien avant que le joueur russe n’ait terminé de combler la distance qui les séparait. Se fendant d’un rire sardonique et vicieux, elle repassa à l’attaque, faisant cette fois-ci brièvement tourner son arme au-dessus de sa tête, le vrombissement assourdissant de celle-ci ne rappelant aucunement le cliquètement métallique qu’on aurait été en droit d’attendre de chaines normalement maniées.

Une fois de plus, le monstre les projeta sur Vsevolod, variant cette fois son assaut. D’un mouvement ample de son bras, il balaya de droit à gauche l’espace qui se trouvait devant, cherchant à enrouler les maillons de son arme autour du corps du combattant. Serrant les dents, ce dernier attendit le dernier moment avant d’utiliser le pouvoir que lui avait offert le système : activant son pouvoir d’ombre séculaire, il sentit l’espace d’un bref instant son corps accélérer, esquivant le coup d’un bond prodigieux vers l’avant. L’attaque passa juste en-dessous de ses pieds, enserrant un bref instant l’ombre qu’il avait laissé derrière lui, avant que cette dernière ne se dissipe sous le coup. Trompé l’espace d’un bref instant par la supercherie, son adversaire ne réagit pas à temps quand Vsevolod atterrit avec toute la grâce d’un éléphant enragé sur son corps gigantesque, utilisant son épaule comme perchoir et se mettant à le travailler au corps. Le premier coup de sa hache vint s’écraser sur la jointure de son épaule, faisant jaillir un flot bouillonnant et épais d’hémoglobine bleue. Il n’attendit pas la réaction de la créature, et recommença, encore et encore, hurlant toute sa colère et sa haine de son ennemi. Il était contre lui, lui criait son instinct, cette voix qui en lui était si audible et forte, et qui souvent s’exprimait aussi clairement que le reste de ses pensées. Il était son ennemi. Il devait mourir, être anéanti, pulvérisé, broyé, dispersé, jusqu’à ce qu’il ne reste rien de lui que le souvenir de sa défaite, et que Vsevolod puisse dévorer ce dernier à son tour, lentement, en le savourant. Il frappa encore, un hurlement puissant faisant vibrer sa cage thoracique, et une fois de plus. Le sang couvrait son visage, et le bras de la créature n’était plus attaché au reste de son corps que par un mince filament de chair. Elle hurlait, et tentait de l’attraper, mais à chaque fois un nouvel assaut du joueur interrompait son mouvement, la saisissait de douleur et l’immobilisait. Il frappa une fois de plus, et eut la satisfaction jouissive de voir l’acier de sa hache traverser la chair haïe sans obstruction : le bras était sectionné, et de la blessure béante la vie de la créature continuait de s’écouler.
Vsevolod Yegorovich
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Sam 26 Déc - 13:33
Il ne s’arrêta pourtant pas, et se retourna vers elle. La carricature ambulante, ayant finalement retrouvé un tant soit peu ses esprits, voulut l’attraper de sa main restante. Un coup supplémentaire de hache fit sauter deux de ses doigts, les reliquats de chair s’écrasant au sol. Vsevolod se retourna tant bien que mal, sa prise se faisant hasardeuse sur le corps agité de tremblements, et son poing alla s’écraser sur le visage disgracieux du monstre. Une fois. Deux fois. Il recommença, encore, et encore, l’énergie de ses coups forçant la créature voutée à se déplier, plus à ployer sous ces derniers, jusqu’à ce qu’elle se retrouve sur le dos. Il la regarda, et lui cracha au visage. Il ne doutait pas que le sien n’ait en ce moment absolument rien d’humain, déformé qu’il était par le grognement animal qui s’échappait en continu d’entre ses lèvres retroussées. Ce n’était pas important. Il n’y avait personne pour lui faire la leçon, ni policier trop curieux de comprendre ce qu’il faisait de ses congénères, ni journaliste fouineur, ni même le moindre humain capable de le regarder et de le juger et de le condamner. Il était seul, avec en face de lui ce morceau de viande qu’il devait tuer. Et quand enfin il en aurait terminé avec lui, se dit-il en abatant sa hache sur sa poitrine, visant la blessure qu’il y avait déjà laissé, quand enfin le cadavre brisé de ce monstre serait étendu à ses pieds, il serait dument récompensé. Le système voyait ses actes, et les approuvait. Chaque mort était un sacrifice juste et bien reçu, qui l’emplissait d’une énergie nouvelle. Chaque victoire était une pierre de plus dans la construction d’un temple gigantesque, avec pour seule statue divine son propre visage, et ses crocs et ses griffes. Il regarda la viande qu’il charcutait, et la vit lentement s’ouvrir sous lui, comme une fleur bleuâtre sous la lumière douce et aimante du jour. Il planta sa hache dans le flanc de l’ennemi, libérant ses mains.

Plongeant celles-ci dans la cavité qu’il venait de creuser, il chercha la cage thoracique du monstre, ses doigts s’enroulant autour de ses os. Sourd à ses protestations et à ses cris de douleur, il tira, écartant les os et faisant craquer la structure finalement très délicate. Il tira, jusqu’à faire éclater le tout, et voir les pointes de ses cotes libérées des contraintes de son corps, pointant à l’air libre comme autant de défenses d’ivoires, souillées d’une matière gluante et puante. Il regarda l’intérieur du corps de la créature, et ne fut guère surpris lorsqu’il le découvrit tristement similaire à celui d’un homme. Tout y était plus gros, mais finalement agencé de la même manière. Alors il y plongea ses mains et sa gueule, le visage fou et les yeux écarquillés, ne prêtant aucune attention à la sensation de ses propres yeux aspergés de liquide. Il trouva le cœur de la bête, un organe gigantesque et gros, plus encore que celui d’un bœuf ou d’un taureau, et le prit entre ses mains tremblantes. Il pulsait puissamment, et dans cette pulsation il lisait la détresse et la colère de son adversaire.

Comment le système pouvait-il créer des créatures capables d’émotions si semblables à celles des hommes ? C’était, il en était certain maintenant, le même genre de palpitation qui prenait le cœur de ses victimes lorsqu’il les sondait. Il mordit dedans, sectionnant la première artère, puis la deuxième. Les cris de protestation du monstre étaient redevenus silence depuis déjà plusieurs moments, mais cela ne concernait pas Vsevolod. Il y avait dans cet instant de révélation furieuse, de méditation pleine de sang et de chair plus de vérité à saisir que dans toute autre contemplation. Le système, et les quêtes, et lui-même, et tout cela et le reste. Il voulait comprendre ce qui se passait, ce que tout cela impliquait pour lui. Il voulait retrouver le contrôle de son existence, perturbée par l’arrivée de cette entité incompréhensible. Enfin, il sortit au bout d’un poing triomphant son trophée, avant de s’extraire à son tour. Il porta devant ses yeux plissés le cœur, discernant à travers le voile sanglant et bleu qui couvrait son regard sa vérité. Il le renifla doucement, et le porta à ses lèvres, avant de croquer dedans. Il était victorieux, et en ce moment-même cela n’avait pas plus de sens pour lui que les récompenses promises par le système. Il faisait cela pour lui, par lui, dans un but que lui seul était à même de concevoir, dans un rite que lui seul était à même de comprendre. Il ignora le message de l’entité, qui l’avertit que la quête était accomplie, et seulement lorsqu’il fut satisfait de son union cannibale avec le monstre accepta-t-il de se relever, regardant la lourde porte de bois qui était tout à l’heure restée close. Il l’emprunta, retrouvant l’air froid du monde réel, et se dirigea vers sa cave, et son prisonnier. Il savait, maintenant. Il savait comment le traiter, et le sublimer et faire en sorte que son sacrifice soit le plus beau que l’on puisse jamais imaginer.

Finalement, peut-être y avait-il du bon dans ces fêtes de Noël.
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